"L'oeuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité" est le titre d'un article essentiel de Walter Benjamin.
Cet article débute par une citation de Paul Valéry de 1934 dont voici une phrase : "...Il y a dans tous les arts une partie physique qui ne peut plus être regardée ni traitée comme naguère, qui ne peut plus être soustraite aux entreprises de la connaissance et de la puissance moderne. Ni la matière, ni l'espace, ni le temps ne sont depuis vingt ans ce qu'ils étaient depuis toujours. Il faut s'attendre à de si grandes nouveautés..."
Quelle vision si anticipatrice, pour nous qui avons vu cette reproductibilité exploser avec l'informationnalisation !
La vision de Benjamin, partant de l'art, va bien au-delà, comme lorsque Marx situe l'art dans le contexte général, c'est un essai de syntèse de sa vision du processus humain dans sa totalité sensible. La reproductibilité de l'art est aussi le développement des techniques de reproductibilité de tous les produits humains. Dans l'aliénation de l'activité et les libérations dont les temps ouvrent les portes.
Il en est de même pour le développement de cette question dans l'article de Walter Benjamin de 1939 (dernière version, à l'orée de l'apogée de la domination hitlérienne sur l'Europe) et qui débute ainsi :
"...lorsque Marx entreprit l'analyse du mode de production capitaliste, ce mode de production était à ses débuts. Marx orienta ses analyses de telle sorte qu'elles reçurent valeur de pronostic. Il remonta aux rappots fondamentaux de la production capitaliste et les représenta de telle façon qu'ils révélèrent ce qu'on pouvait encore, dans l'avenir, attendre du capitalisme. La conclusion fut qu'on pouvait en attendre une exploitation renforcée des prolétaires, mais finalement aussi l'instauration de conditions qui rendent possible sa propre supression..."
Et s'achève ainsi :
"...Au temps d'Homère, l'humanité s'offrait en spectacle aux dieux de l'Olympe; c'est à elle-même aujourd'hui qu'elle s'offre en spectacle. Elle s'est suffisamment aliénée à elle-même pour être capable de vivre sa propre destruction comme une jouissance esthétique de tout premier ordre. Voilà l'esthétisation de la politique que pratique le fascisme. Le communisme y répond par la politisation de l'art..."
...la suite : ici (7 pages extraites de l'article)
http://www.pierreassante.fr/dossier/Bloch_l_oeuvre%20d_art_a_l_epoque_de....pdf
Pierre Assante, 24 février 2011